Drheam Cup 2022 : Une sixième place pour réapprendre à faire simple

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On ne le dira jamais assez, la voile est un sport hautement psychologique, et la gestion du mental est un facteur primordial de la performance. En arrivant sur cette Drheam Cup 2022, j'avais très envie de montrer qu'il fallait compter sur moi dans cette Class40 où le nombre de concurrents sérieux n'a cessé d'augmenter ces derniers mois. Peut-être un peu trop ? Après avoir remporté le prologue de cette belle édition, je suis en tous cas parti en sentant une pression inhabituelle sur mes épaules, et j'ai vite eu le sentiment de ne pas réussir à naviguer aussi proprement que j'en suis capable. En toute franchise, ce sont des choses que je découvre et que j'apprends progressivement à maîtriser, mais qui sont moins faciles à appréhender pour moi que des bons vieux raisonnements mathématiques, réconfortants de rationnalité. Je vous raconte ça en détail ? 

 

 

Dimanche 17 juillet, 14 h 20. Grand soleil, plus de vent qu'attendu : un départ de carte postale pour cette quatième édition de la Drheam Cup. Je suis pourtant plutôt prudent sur cette entrée en matière. Déjà, parce que je veux être sûr de ne pas griller le départ - la punition est sévère si on coupe la ligne trop tôt. Et surtout parce que j'essaie de me rappeler que ce n’est clairement pas là que tout va se jouer - un peu de maturité pour moi qui ai un d'ordinaire un tempérament plutôt offensif ! Je passe quand même dans la première partie de flotte à la bouée, puis on a un petit bord de portant pas désagréable en baie de Cherbourg pour faire le spectacle. Je fais simple et ça se passe à peu près bien pour moi !

Puis arrive la traversée de la Manche. Je décide d’accélérer un peu en allant sous la route et en espérant une bascule à la fin du bord, couplée à une renverse du courant qui me permettrait d’être bien positionné. Il s’avère au final qu’il y a plus de vent que ce que les fichiers annonçaient, du coup on avance plus vite que prévu. Rézsulat : pas de renverse avant d’arrivée à la bouée, ce qui ne fait pas mes affaires… La rotation sur laquelle j’avais misé finit bien par arriver, mais très tardivement et à proximité immédiate de la bouée, et c’est donc beaucoup trop tard pour que mon placement soit intéressant. A la fin de la foire, c’est donc  un bord sur lequel je perds plus que je gagne, et ce n’est pas la meilleure entrée en matière pour se mettre dans sa course !

Cafouillage à l'anglaise

Ensuite, on commence à longer les côtes anglaises sous spi. Je ne m’en sors pas trop mal de la manœuvre de changement entre gennaker et spi, mais assez rapidement derrière on se prend sur le coin du nez un nuage bien sombre et chargé en électricité. Le vent accélère, ça mouille un peu, ça tourne (pas forcément à mon avantage à nouveau)… et surtout, je perds une partie de l’électronique ! J’ai un capteur et surtout son interface qui déraillent sévère, et le temps de diagnostiquer la source du problème et d’avoir de nouveau une installation saine et fonctionnelle pour toute la partie centrale de navigation… ça me fait pas gagner du terrain, et ça me prend du temps et de l'énergie !

Dans cette phase là, les bateaux derrière reviennent et le petit paquet devant se barre. Je suis en retrait, et comme souvent ça commence à cafouiller... Je tente des trajectoires différentes pour essayer de revenir vite, ça me fait chercher des opportunités là où il n’y en a pas forcément, et là encore ce n’est pas très payant et je continue à perdre du terrain. Je ne sais pas si c'est comme pour l'artiste, mais pour le voileux je peux vous le dire : l'inspiration ne vient pas dans les moments où on fait le dos rond !

Enfin le comeback

Au milieu de la mer d’Irlande, je me retrouve un peu seul et pas très bien au classement. Le vent commence à se renforcer avec l’arrivée d’un petit front, et j’ai enfin l’impression de retrouver le mode d’emploi. Je lève la tête de mon guidon, je regarde autour de moi et de retrouve le sens des éléments auxquels on est confrontés… J’arrive à envoyer le gennaker assez tôt par rapport à mes concurrents, ce qui me permet de faire une route directe vers le Fastnet et retrouver la tête de course à 4-5 milles du phare irlandais, où la pétole s’installe et on assiste à un beau rassemblement des troupes. C’est une phase de molle classique avec des moments où tu t’arrêtes et d’autres où tu repars sans forcément de préavis. Il faut « être dessus », c’est tout. J’arrive à m’extirper sans trop y perdre de plumes, et je passe 5e la marque de parcours la plus Nord, avec les quatre premiers pas si loin que ça devant. Ca fait du bien, mais peut-être que le soulagement de revenir m'endort un peu sur mes lauriers. Encore une fois, c'est toujours plus facile d'analyser après coup !

Une heure après le passage du Fastnet, nous voilà enfin dans le front tant attendu, qu’on nous annonçait depuis le départ : du portant bien musclé, des conditions pas si fréquentes et qui nous permettent d’exploiter toute la puissance de nos bateaux à carène large. Je commence par du grand spi et plus ça forcit, plus on réduit la toile. C’est une phase où paradoxalement les premiers sont un peu défavorisés car ils sont un peu décalés dans l’Ouest. Plus on est « en retard », plus on crée du décalage latéral au moment où ce vent de Nord-Ouest rentre. Je réduis donc un peu l’écart avec ceux de devant du coup, mais ceux de derrière réduisent encore plus leur écart sur moi. On appelle ça « revenir par derrière », et il n’y a pas grand-chose à y faire !

Nouveau record de vitesse

Cette descente, c’est un peu le rodéo. On a du vent fort, de la mer formée. Je n’ai pas d’appréhension dans ces conditions, notamment parce qu’on les a bien travaillées en février lors de notre entraînement au Portugal. Je cherche le bon dosage entre garder suffisamment de toile pour aller vite et bas vers l’objectif, et pas trop pour pas partir en vrac tout le temps. Ai-je été trop conservateur ? Avec un peu de recul, je me dis que j’ai sûrement placé le curseur un peu trop vers la prudence par rapport à certains camarades, mais là encore, quand on vit le truc c'est pas si simple de le réaliser... Ca fait quand même un joli bord, avec même un nouveau record de vitesse pour le bateau  31,8 nœuds sur les écrcans, et les genoux qui tremblent un peu à l’idée de finir par s’encastrer dans le mur de vague… mais pas de bobo au final pour Mad Max qui me montre tout son potentiel !

J’arrive aux alentours de Ouessant en sixième place. De la pointe bretonne jusqu’au plateau de Rochebonne, c’est toujours au portant avec des empannages et on navigue tous à peu près dans le même vent ce qui rend le jeu pour revenir très limité, mais me permet de créer un peu d’écart avec mes poursuivants. Sur la remontée au près vers la Trinité-sur-Mer, je pense avoir une bonne vitesse. Je vais jouer une petite transition de vent sous Belle-ïle qui me permet de revenir un peu malgré le timing plus tardif que prévu de la rotation de vent. Dans la baie de Quiberon, je reviens quand même à portée visuelle du groupe des quatre bateaux devant moi, et sur la ligne d’arrivée, j’ai 2 h 20 de retard sur le vainqueur, Xavier Macaire, qui fait une magnifique course, et moins d'une heure sur le second, Corentin Douguet, et le troisième, Simon Koster. Une heure. C’est peu après quatre jours en mer, mais c’est une heure synonyme de sixième place, et c’est donc forcément décevant pour moi au bout du compte, puisque j’étais parti avec plus d’ambitions.

Conclusions philosophiques (mais pas trop parce qu'on a dit qu'il faut apprendre à faire plus simple)

Quelques jours après l'arrivée, et quelques bonnes nuits de sommeil entre-temps, il me faut tirer le bilan de tout ce que j’ai vécu sur l’eau. J'ai bien discuté avec les différents coachs avec lesquels je suis amené à travaillé, et j'ai des pistes de réflexion pour essayer de naviguer plus "libéré" à l'avenir. Je sais que je sais faire - preuve en est que mes résultats cette année sont loin d'être catastrophiques, puisque je fais 3,4 et 6, et je sais que beaucoup aimeraient pouvoir en dire autant. Mais je sais aussi que je peux faire bien mieux. Sur cette course, j’ai sûrement un peu trop regardé ce que faisaient les autres et, au final, les phases où je réussis le mieux sont celles où je me retrouve seul, à me faire confiance et à n'écouter que moi. Parfois, c’est un travers humain de vouloir complexifier les choses qui doivent rester simples ! Mais je retiens quand même ce sentiment en arrivant dans la baie de Quiberon : l’envie que cette Drheam Cup ne soit que le premier tour du circuit et qu’on reparte pour une deuxième boucle… Vivement que ça dure un peu plus longtemps nos bagarres ! 

Merci à tous de m'avoir lu, et de continuer à suivre mes petites aventures. A l'heure de rentrer au chantier pour des grands travaux aoûtiens, c'est évidemment toujours un grand motif de fierté pour moi de sentir votre intérêt pour mes petites réflexions personnelles ! Pour avoir plus d'infos, n'hésitez pas à me suivre sur Instagram ou Facebook, où vous trouverez quasi quotidiennement des nouvelles fraîches...

 

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