Les Sables-Les Açores, étape 2 : j’écope donc je suis

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Rares sont les sports qui apportent autant de variété et de surprises que la course au large. Parce que nous devons toujours composer avec la nature et la météo, ses caprices et ses impulsions, aucune course ne se ressemble. Et l'édition 2018 des Sables-Horta-Les Sables en a été de nouveau une belle illustration. C'est bien simple, entre la première étape et la seconde, on passait sur le menu des brocolis vapeur à une tartiflette au foie gras...

Le vent pas forcément très fort en début de parcours était prévu rentrer petit à petit, à mesure que nous allions grimper au nord de la route pour attraper un front froid... et oui, encore un, prévoyez le casque, l'armure, et le manchon étanche ! Mais à la différence de l’aller, nous allions faire route dans le même sens que ce front, ce qui veut dire que nous serons "au portant". Une allure pas forcément plus confortable, mais qui a le mérite de faire avancer très très vite nos petits bolides ! On n'a pas été déçus...

 

      

Seul bord de près de la course, celui pour aller vers la ligne d'arrivée ! Photos : Christophe Breschi

 

Pointe de vitesse à 19,5 nœuds !

Le départ dans le vent perturbé entre les îles me réussit bien et je mène la flotte pendant quelques dizaines de minutes avant de me retrouver au coude à coude avec Erwan Le Mené sur le 800 pour contourner la pointe Ouest de Sao Jorge – celle-là même que j’avais déjà eu le temps d’admirer longuement à l’aller. La phase de transition pour récupérer le vent attendu redistribue un peu les cartes, mais je ne m’en sors pas si mal dans la grande loterie d'Eole ! J'entame donc cette seconde étape dans le paquet de tête, d’abord sous grand gennaker, puis sous grand spi après que le vent a adonné. 

Après une bonne demi-journée de course le quatuor de tête de l’aller est reconstitué quand Erwan décide de faire cavalier seul et empanne vers le nord. Je trouve ça précoce... Force est de constater que François Jambou et Jorg Riechers aussi, puisque nous restons sur le même bord et empannerons quasiment en même temps, presque 6 heures plus tard. A l'échelle d'une course, c'est un décalage conséquent ! Le vent rentre petit à petit, le bateau accélère, quelle récompense après cette longue et éprouvante première étape et tous ces mois de chantier ! J'aimerais trouver les mots pour décrire l'euphorie de sentir le bateau accélérer, glisser, surfer sur les vagues sans aucune autre énergie que celle du vent... Comment ça, je suis gravement atteint ?!

Quand nous empannons de nouveau pour faire route vers les Sables d’Olonne après deux jours de course, les écarts ne sont pas significatifs, il reste plus de 1000Nm à parcourir. On avance vite et sur la route, les conditions commencent à être un peu engagées mais c’est tellement grisant ! La pointe de vitesse du bord sera réalisée par le pilote automatique – qui lui n’a jamais peur de l’atterrissage quand on décolle -, avec un joli score de 19,5 nœuds. Mais en fin de nuit, après déjà quelques heures pied au plancher, je sens le bateau moins à l’aise, il a plus tendance à mettre le nez dans la vague qui le précède en bas des surfs… Je mets ça sur le compte de l’état de la mer qui s’est un peu détérioré avec des vagues plus croisées. Clairement, la jeunesse du bateau fait que je manque encore de repères et lâche pas mal d’énergie à essayer de trouver les clés pour retrouver les bonnes sensations. 

 

      

Retour express vers Les Sables d'Olonne ! Photos : Christophe Breschi

 

La grosse douche !

Aux premières lueurs de l’aube, je comprends que la crash-box – c'est-à-dire le compartiment étanche à l’avant de la  coque – est complètement pleine d'eau. Des filets suintent par la trappe… Il n’apparaît pas très malin d’aller voir ce qu’il se passe à l’avant avec le bateau qui fonce comme un damné sous pilote. J’affale donc le spi. Il faudra que je pousse avec mes deux pieds pour décoller la trappe tant la pression de l’eau est importante dans le compartiment. Résultat : une sacrée douche, je finis trempé de la tête aux pieds. 

Après une grosse mission écopage où je sors une douzaine de seaux, je constate que je prends l’eau par le collage d’une petite tôle d’étanchéité (non structurelle) qui s’est fissuré sous la pression, tout à l'avant du bateau… L’entrée d’eau n’est pas importante mais à chaque vague, la pression crée un geyser à l’intérieur de la crash-box. Rien de dramatique en soi, il s’agit uniquement de refaire le collage proprement avec du sika, une pâte imperméabilisante. Seulement ce qui prendrait 15 minutes à terre ou au ponton prends une toute autre ampleur quand le bateau avance et surfe dans les vagues…

Je fais une première réparation alors que je n’ai toujours pas renvoyé de toile devant mais à chaque vague je vois de nouveau de l’eau rentrer. Je temporise encore un peu pour laisser le sika durcir un minimum. Un acte de patience d'autant plus dur à faire que je vois François Jambou revenir sur moi puis passer à mon vent et disparaître devant mon étrave… Je remets une petite couche de sika et renvoie le spi medium. Le bateau réaccélère, je prends toujours l’eau de façon significative, je sors environ deux seaux toutes les heures…

Nous faisons route en tribord amure en avant du front qui tarde à nous rattraper, j’ai peur de me retrouver dans moins de vent si je me décale trop dans le sud et décide d’empanner un peu avant la rotation du vent pour « forcer » le front à me passer dessus. Peu de temps après, le vent refuse et c’est désormais en alternant entre le grand et le petit gennaker que l’on fait route directe sur les Sables. Le nez du bateau est plus soulagé à ces allures, cela me permet de peaufiner encore un peu l’étanchéité de ma réparation, je ne sors plus qu’un seau toute les heures… mais j'ai quand même bien l'impression d'être un Shadok ! 

 

 

Deux podiums en deux étapes !

Nous parcourons ces 700 derniers milles à bon train, c’est une véritable course de vitesse vers l’arrivée, à celui qui mettra plus de rythme que les autres. A ce petit jeu, il faut absolument saluer l’énorme performance de Camille Taque sur le 791, qui nous aura vraiment tenu la dragée haute avec son proto pourtant un peu plus ancien, allant même jusqu’à occuper la troisième place du classement ! En tête, Jorg Riechers « pourrine » autant qu’il peut pour sa dernière course en Mini et avec ce bateau sur lequel il a fini second de la Mini-Transat 2017, je n’ai clairement pas encore assez navigué avec Tartine pour rivaliser. Erwan Le Mené, décalé légèrement au nord, fait ce qu’il peut pour essayer de lui ravir la première place malgré ses soucis d’énergie.

Au cinquième jour de course, je suis pointé cinquième. Nous sommes à moins de 24 h de l’arrivée, c’est le moment de donner tout ce qu’il me reste d’énergie ! Ça tombe bien car après ce début de course sous la grisaille, les batteries du bateau sont quasiment à plat… A moi de jouer donc, je ne lâcherai plus la barre. Au matin du sixième jour, à quelques dizaines de milles de l’arrivée, je distingue une voile noire faisant la même route que la mienne, un concurrent que j’identifie rapidement comme François Jambou sur le 865 – large vainqueur de la première étape. Je suis un peu en retrait et sous son vent, ça n’apparaît pas gagné pour le doubler… Je m’applique autant que je peux – malgré des yeux qui clignotent régulièrement de fatigue, façon guirlande de Noël.

Au classement journalier du matin, je comprends que l’on se bat pour la troisième place de l’étape ! Le genre d'informations qui a tendance à me galvaniser... Ca tombe bien, je suis un poil plus à l’aise que lui en vitesse sous gennaker et prends un petit avantage que je garderai jusqu’à l’arrivée sous spi… Deux podiums en deux étapes !

 

      

Deux fois 3e, des débuts au large prometteurs pour Tartine ! Photos : Christophe Breschi

 

Petits défauts de jeunesse

Au classement général, je suis content de finir à une belle quatrième place. Compétiteur dans l’âme, je ne saurais m’en satisfaire pleinement, mais deux mois après la mise à l’eau je suis fier du chemin parcouru. J’ai accumulé en peu de temps une grosse expérience avec mon nouveau bateau, je pense avoir déjà bien progressé dans son utilisation et j’ai surtout pu identifier les axes principaux de travail pour réussir à exploiter au maximum de son potentiel que je suis loin d’avoir atteint…

A titre personnel, c’est particulièrement encourageant, et ça me donne envie de régater à nouveau en ayant gommé les quelques petits défauts de jeunesse… Je suis également très content pour mes concurrents et amis, François qui aura marqué les esprits sur la première étape remporte logiquement le classement général, Erwan termine second comme à chacune des deux étapes et mérite amplement de gagner son titre de Champion de France, Jorg complétant le podium pour adieux (au refoir ?) à la Classe Mini… 

Dix-huit mois déjà se sont écoulés depuis le début du chantier, et le bilan est donc très positif. De quoi revenir encore plus mort de faim pour les deux dernières courses de la saison, la Duo Concarneau début septembre et la Chrono 6,50 à la fin du mois. 

 

      

Le podium de la 2nde étape. Photos : Christophe Breschi

 

Merci encore de suivre mes aventures, à très vite !

Axel

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